L’ami d’enfance de Maigret – Maigret – George Simenon (1968)

  

Réédition Le Livre de Poche n°14213, 1997, d’une VO de 1968

Maigret, une nouvelle fois, autopsie l’« homme nu » qui lui est cher, récurrente thématique qui est la racine de l’œuvre romanesque de Simenon. Sous le scalpel de la prose de l'écrivain, apparait en creux l’art et la manière de sonder une âme, de disséquer une personnalité face à son destin, de racler jusqu’à l’os ce qui l’a conduit inexorablement face à lui-même, au bout d’un chemin qu’il s’est imposé ou qu’il a subi.

Ici : la cible est un ami d’enfance, Léon Florentin que Maigret n’avait pas croisé depuis des décennies. C’était au lycée de Moulins, près de Saint-Fiacre dans l’Allier.

Nombre d’années plus tard, le Paris des années 60’s. C’est l’été. Un beau mois de juin tout en soleil. Le Quai des Orfèvres, le bureau de Maigret toutes fenêtres ouvertes sur un coude de la Seine. Face à lui Leon Florentin que le commissaire aurait souhaité presque ne plus revoir ; il vient solliciter son aide. Il risque d’être accusé à tort du meurtre de sa maitresse, presque sa concubine; en fait il est son amant de cœur alors qu’elle se fait entretenir par quatre autres amants qui ignorent tout les uns des autres. Sacrée organisation quand les rendez-vous se font à domicile sous les yeux de la concierge qui suit le manège et de Florentin dont le seul souci est de ne pas perdre sa place.

Maigret creuse la situation, découvre que conformément à ce que Florentin montrait jadis au lycée, le boute-en-train cynique qu'il a connu  ne cesse de fanfaronner, de mentir, d’enjoliver sa situation proche de la dèche totale; il est un brin mytho mais surtout très fainéant. La disparition de sa maitresse n’arrange rien, c’était son porte-monnaie, ses tournées au café, le moyen de ne pas travailler, l’art de paraitre quand on a les poches vides. Florentin, au final, n’a jamais été quelqu’un de bien … mais au nom des liens de l’enfance Maigret fera service minimum pour lui venir en aide. Il ira de surprise en surprise, il est des hommes que rien n’arrête même pas la honte la plus crade.

A mon avis, ce n’est pas le meilleur des Maigret mais il se laisse lire sans déplaisir; je me demande si ceux avec qui je suis moins en accord ne se situent pas en queue de carrière de Simenon. On y sent comme des déductions d’enquête policière à l’anglaise, le nombre des coupables possibles étant limité : quatre amants portefeuille, un de cœur et une concierge tenace qui par son silence et son caractère se heurte de pleine bille à Maigret. Le roman est court, tout en dialogues bien agencés, il se lit vite comme en un courant d'air.